Alain Amrah Horutanga

Territoire occupé

Minuit,

Les étoiles prenaient congé. Je plongeais nuitamment dans les profondeurs de son cœur où j’allais, comme un voleur, m’accaparer de la plus grande richesse qu’il possède, l’amour. J’avais peur que les étoiles filantes ne me poursuivent et me rattrapent sur la route de ma nouvelle aventure. Mes yeux trahissant mes envies de conquête, brilleront de mille et une couleurs rendant l’arc-en-ciel jaloux.

Plume à l'eauSon cœur perdu et casé dans les ténèbres du doute, ne pouvait être accueillant. Comment forcer la barrière d’épines où des vaillants conquérants avaient échoué?

La lune qui lui tenait compagnie était au service du chagrin et des regrets. Par complicité, le vent lui soufflait aux oreilles une mélodieuse oraison qui l’écartait du champ magnétique de l’amour.

J’emmenais avec moi une cohorte de mots et de gestes. J’étais le poète à la recherche du bonheur et son cœur en était le passage obligé. Sur le côté de mon arme, ma plume, on pouvait lire : J’entrerai, je bloquerai toutes les issues et j’écrirai en lettres d’or « territoire occupé ! »


Pourquoi #JeSuisCharlie

Manifestation #JeSuisCharlie devant l'ambassade de France au Burundi
Manifestation #JeSuisCharlie devant l’ambassade de France au Burundi

En réponse à toutes ces personnes qui trouvent qu’être Charlie est un acte irrespectueux envers les morts africains.

« Es-tu aussi Charlie ? » C’est une question taquine qui se faisait presque accompagner de… pourquoi ne parlez-vous pas Boko Haram au Nigeria ? Ici même en face, au Congo, c’est combien de morts par jour, combien de viols ? Alors pourquoi le monde devrait pleurer la mort de dix-sept Français ? En guise de conclusion vient « Vous êtes encore sous la colonisation. »

Je vais essayer de me justifier en répondant à ces « frustrés » de la colonisation qui ont toujours pour ennemi l’Occident même plus de cinquante ans après les indépendances.

Charlie, la goutte.

Qu’est-ce que Charlie pour moi ? C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase, le rien qui manquait pour que le vase plein de larmes que le terrorisme et l’intégrisme religieux ont fait couler à l’humanité, déborde. C’est l’occasion pour s’indigner contre toute forme de barbarie.

Il y a eu des attentats du 11 septembre aux USA, il y a eu des attentats à Londres, à Madrid, à Nairobi à Kampala, etc. Au Moyen-Orient, en Somalie et au Nigeria, les scènes de désolation font partie du décor. Mais lequel de ces évènements cités a eu un tel écho ? Jamais une onde d’indignation n’avait atteint une telle proportion. Certes les réseaux sociaux ont contribué à ce que cette vague aille au-delà de sa rive mais la campagne #BringBackOurGirls qui semble s’estomper nous prouve que seuls les réseaux ne suffisent pas.

Manifestation #JeSuisCharlie devant l'ambassade de France au Burundi
Manifestation #JeSuisCharlie devant l’ambassade de France au Burundi, le 11 janvier

Voici donc une occasion de surfer sur cette vague d’indignation pour dénoncer la terreur qu’une bande d’ignorants nous livre tous les jours. Pourquoi devrais-je être interdit de me photographier ou photographier certains lieux (natures, bâtiments, monuments…) dans mon propre pays ? Pourquoi devrais-je accepter de vivre comme un prisonnier parce que certaines routes, certains lieux me sont interdits d’accès à cause des Al Shebab. Pour tout cela, je suis Charlie.

L’Afrique ses morts et ses dirigeants

Certains m’ont reproché d’être un vendu à la solde de l’Occident. Certes, Il est vrai qu’on nous ponde un spécial à longueur des journées sur attentat à Boston qui fait deux morts pendant que chez nous en Afrique un millier de personnes meurent tuées tous les jours (j’exagère mais en additionnant les morts de la R.D. Congo, du Nigeria, de la Somalie, Centrafrique et de la Libye on atteint facilement ce nombre) cela se passe sans commentaire. Une indifférence que nous-mêmes Africains, créons.

A Beni une vingtaine de personnes meurent alors que la télévision Nationale Congolaise passe son temps à glorifier un Président de la République qui offre une ambulance à un hôpital public signé « Don du Chef de l’État ». Si la télévision parle de Beni, elle passe pour une brève comme si c’était normal que les gens de ce coin meurent sans qu’on ne parle d’eux. Si vous croyez être Kivu sans être Charlie, vous n’avez rien compris. Acceptez que les autres puissent être des Charlie. Le terrorisme est un cancer pour l’humanité.


Là où le Père Noël ne passera pas

Dans ce petit coin du monde, le Père Noël ne foulera pas le sol. Aurait-il peur que ses rennes finissent grillés par le feu qui couvre la ville. Aurait-il aussi peur qu’on ne lui ôte la vie dans cette région où tuer est un acte du quotidien ?

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Ce n’est pas le bout du monde et pourtant le Père Noël, tout comme la joie et la gaieté, semble être parti pour l’éternité. Les rues de la désolation sur lesquelles les enfants assistent tristement à des cérémonies funèbres incessantes portent les fruits du malheur. L’enterrement d’un père, d’un frère, d’une sœur ou d’une mère, le viol d’un nourrisson ou d’une vieille dame font partie de la vie de la ville. Tout est en ruine. Les bombes passent par là. Les fils du diable y résident-ils ?

Les familles décimées qui attendent madame Justice agonisante souffrant de la corruption et du cancer du favoritisme, n’ont plus qu’un espoir : la réanimer par les prières. Et Dieu entend-il leurs prières ? Le météorologue de la place avait annoncé des nuages chargés de sang. Et que les vents violents accentués par les cris de détresse empêcheraient, avec la complicité de la couche d’ozone, les prières de monter droit vers les cieux.

Orphelins dès leur naissance,même le sourire ne semble plus faire escale sur leur visage, laissant place permanente à l’amertume et aux torrents de larmes qui coulent sur leurs joues. « La vie n’est qu’une mort occupée à faire le ménage ailleurs, il reviendra vers nous », disait l’intellectuel de la ville abattu par une hache un soir de réveillon. Il était d’ailleurs écrit sur son cœur ouvert : « Voici celui qui aurait pu vous sauver. »

En écrivant ces mots, je pense aux petits chrétiens syriens et irakiens persécutés aujourd’hui. Je pense à ces enfants de Beni en RDC qui vivent la peur au ventre. Je pense à ces enfants du Nigeria otages des inconscients. Je pense également à ces petits Pakistanais tués récemment. Ma pensée va aussi aux petits Palestiniens qui naissent et grandissent dans un environnement de violence et de haine. Je pense à tous les enfants du monde qui se retrouvent dans des camps de réfugiés, de déplacés ou dans les prisons. Ils ne liront pas ce billet, mais quand nous dévorerons la cuisse du poulet de Noël, pensons à eux. Ils ne sont pas responsables de ce qu’ils vivent.

 


Le vote est un droit

Ces derniers temps, j’ai comme l’impression d’avoir offensé des millions de burundais pour avoir dit à certains que je renonce à mon « droit de vote ». De tous ceux qui m’ont regardé comme un virus très virulent, personne n’a voulu savoir quelle serait la cause de ce comportement. Quel drame ! Je suis désolé peuple burundais de vous avoir autant offensé.

En commentant à un post de Roland Rugero sur Facebook, j’ai donné ma position (ramasseur de balles) mais ensuite un commentaire d’Arnaud Nganji m’a poussé à sortir de ma réserve. Moi, qui voulais être discret sur mon positionnement parce que j’encourage les autres à exercer ce droit qui s’universalise de plus en plus.

La sagesse populaire nous apprend que ne pas faire un choix est un choix. Après cette maxime, suis-je toujours obligé de donner les avantages d’un droit pour qu’enfin on me regarde comme un humain ?

Je ne suis pas un mutant.

 » Je vote toujours, par respect pour les gens qui ont tant donné pour que je puisse avoir ce droit. Ils ont payé de leur vie ma liberté de choisir mes dirigeants. Pour eux, j’irai toujours voter ! ! » Arnaud Nganji

Je suis content d’être ressortissant d’un pays où le vote n’est pas une obligatoire. Je pense, à mon humble avis que ceux qui ont donné leur vie pour que nous ayons ce droit de vote, avaient à l’esprit une idée claire : ceux qui ne se retrouveraient pas dans un quelconque programme ne puisse être contraints de voter. D’où l’abstention. Actuellement un courant de pensée prône sa prise considération. D’ailleurs on peut renoncer à l’exercice d’un droit, c’est l’essence même d’un droit.

N.B : Pour le vote d’une loi, il y a trois possibilités : le pour, le contre et l’abstention.

En quoi mon abstention heurterait-elle l’estime de ces hommes et femmes qui ont lutté pour que nous ayons à faire le choix de nos dirigeants?


Je sais désormais où elle va

Vous avez certainement connu des moments où l’inspiration s’envole. Vous vous demandez à chaque fois où elle est partie ? J’ai trouvé où la mienne allait passer son temps.

 

 

Plume à l'eau

 

Mon inspiration prend la forme d’une plume. Elle s’envole au gré du vent. Voltigeant aux côtés des rapaces, elle se confond parfois aux feuilles des manguiers. Dans ma course avec le temps, elle se fait le plaisir de figer mon imagination dans une chambre aux mots assourdissants. Elle enchante la mélancolie afin qu’elle me tienne compagnie. Je lâche la prise comme dans une lutte où ma cervelle est prise à partie. Elle vole avec les sacs plastiques qui font partie du décor de la ville, sillonnant les rues à ses aises. Elle zigzague entre les voitures jusqu’au Tanganyika se plaisant à cette vie de fugue ignorant le danger la guette, l’eau. Elle essaie de toutes ses forces à pagayait pour revenir à la rive sans conviction. Excellente dans la manipulation, Elle se laisse alors emporter par la vague. Elle vogue alors au gré des vagues jusqu’à la plage où j’irai la retrouver, la réanimer pour la ramener à moi.

On s’aime.


Parfois la tentation et la foi peuvent faire bon ménage

A Bujumbura, il y a des hommes qui ont vraiment intégré la citation « la nature a horreur du vide » jusqu’à moelle épinière, au point qu’ils se sont emparé des berges de certaines rivières de la capitale afin que la nature ne reprenne ses droits. Mais têtue qu’elle est, elle prend toujours le dessus sur ceux qui s’entêtent et qui ne prennent pas en considération ses nombreux avertissements

Église construite sur la berge de la rivière Kanyosha et qui menace de s'effondrer
Église construite sur la berge de la rivière Kanyosha et qui menace de s’effondrer

Parmi ces maisons qui sont construites sur les berges vides des rivières, il y a aussi des maisons dites de Dieu, comme l’illustre aussi la photo. Ce hangar à O cm du lit de la rivière, est une église évangélique. Ils n’existent plus d’espaces vides qui séparent la rivière de l’église car l’église même est une partie de la berge. La question qui peut être posée est la suivante : Dieu empêchera-t-Il la catastrophe ou bien le Diable versera sa colère un dimanche en plein culte ? En tout cas pour les croyants, en cas de catastrophe, le diable portera le costume de coupable mais entre-temps Dieu « protège » les fidèles.

L’occupation des berges par certains citoyens peut laisser croire que ce domaine n’est pas règlementé. Il existe un code de l’eau. Le texte d’application n’a-t-il pas encore été élaboré ? Si le texte d’application existe. Qu’est-ce qui expliquerait le rythme croissant des constructions dans les zones tampons ? Pourquoi cette indifférence ? Comment, dans le cas opposé, expliquer que depuis 2012 il n’y ait toujours pas de textes d’application ? Dans tous les cas il y a une négligence constatée de la part des pouvoirs publics. Le code de l’eau prévoit des zones tampons dans lesquelles il est interdit de construire.

N.B : Une zone tampon s’étend sur 25 m de chaque côté d’une rivière.